Le traité transatlantique : un projet dans l’impasse ?
Lancée en juillet 2012, l’initiative d’un accord de libre-échange entre l’Europe et les États-Unis bat aujourd’hui de l’aile. Alors que nombreuses manifestations ont été organisées près des sièges des institutions européennes à Bruxelles pour protester contre le projet, les deux parties ont engagé cette semaine un 8ème round de négociations décisif pour l’avenir du texte.
Une initiative ambitieuse
Le Transatlantic Trade and Investment partnership (TTIP), négocié par la Commission européenne, prévoit la création d’un grand marché transatlantique, avec une zone de libre-échange couvrant environ 45% du PIB mondial, soit le plus grand marché de biens et de services à ce jour. En juin 2013, la Commission européenne a été autorisée par les chefs d’États et de gouvernement de l’UE pour négocier ce traité en leur nom. La première rencontre a eu lieu le 8 juillet 2013 à Washington et, depuis, les cycles de négociation (les »rounds ») se succèdent à Bruxelles et aux États-Unis.
Le texte vise à établir un libre accès mutuel aux marchés, à l’élimination de barrières tarifaires et non tarifaires, l’élaboration de « règles, principes et nouveaux modes de coopération », et plus généralement, la facilitation des investissements. L’ambition du projet résulte dans la nécessité d’une harmonisation des normes nord-américaines et européennes. Selon l’Union européenne, il permettrait une hausse du PIB de l’Union de 0,5% par an, et un apport de 545€ par ménage européen. Largement critiquées pour leur opacité, les négociations, nées en 2013 dans un contexte international marqué par les révélations de l’affaire Swnoden et des actions de la NSA, semblent désormais plus transparentes.
Un projet de plus en plus critiqué
Cependant, l’initiative d’un partenariat est loin de faire l’unanimité en Europe, dont les valeurs commerciales et éthiques diffèrent de celles véhiculées par les américains. Si l’Europe est souvent critiquée pour son hétérogénéité, avec plus de 150 000 réponses envoyées à la Commission européenne suite à la mise en place d’une consultation publique, dont 145 000 « non », la cohésion semble de mise parmi la société civile et les lobbies européens pour s’opposer au projet, particulièrement en France et en Allemagne.
Certaines mesures, telles que la création d’un tribunal d’arbitrage (« Investor-State Dispute Settlement ») de règlement des différends permettraient d’opposer des entreprises à un État, et à ces dernières, en cas de victoire, d’influer directement sur l’évolution des politiques publiques. Une telle proposition fait craindre une adaptation des standards européens sociaux et environnementaux, considérés comme très protecteurs des consommateurs, aux standards américains, largement empreints du libéralisme. Pour pallier l’ambiguïté de cette initiative, la Commission européenne a récemment proposé des alternatives, telles que la garantie pour les États de leur droit à élaborer des législations.
Le texte devra ensuite, s’il les négociations aboutissent, être ratifié par le Parlement européen et par l’ensemble des parlements nationaux des membres de l’Union. Au vue des contradictions que le TTIP soulève, le round qui se joue aujourd’hui dans les bureaux de Bruxelles est décisif pour donner le ton de l’avancée du projet.